Loup Gris lève la tête. Serrés contre lui, les guerriers du clan du Ciel. Dans cette tanière, on a chaud, on ne peut pas se sentir seul. Et si vous en avez l'impression, la réalité revient vite le dessus ; il faut dire que les chats qui dorment ne sont pas des plus silencieux pour certains. Il y a une boule de fourrure noire qui, à quelques "nids" -si on peut appeler ça comme ça- ronfle comme un... Euh... Blaireau. Loup Gris ne connaît pas trop d'animaux en dehors de lui et ses semblables, les chiens, les renards, les blaireaux, ceux qu'il chasse et... les bipèdes. Quoique. Eux, ils iraient dans une autre catégorie. Laquelle? Loup réfléchit. Il pense à leurs monstres qui défilent sur le chemin du tonnerre, ces bidules rapides qui en ont estropié plus d'un, de chat sauvage! Non, les bipèdes sont certainement les créateurs des pièges qui coincent les pattes, les espèces de boucles de fer qui se referment sur le cou -ou les pattes...- des malheureux félins trop insouciants, avec qui l'appât minable tel qu'un bout de nourriture marche comme un poisson accroché à son hameçon. Les bipèdes sont cruels, ils élaborent des stratégies compliquées et il y en a toujours un qui se prendra dans leur toile. Les bipèdes sont donc des êtres bien trop fourbes, vicieux et machiavélique pour être rejetés dans la classe de la faune. Ce serait insulter tous les animaux de la forêt! On ne compare pas de telles créatures à un chat qui a toute la splendeur et la force de ces ancêtres, les nobles lions à la crinière majestueuse. Rien à voir avec cette chose qui marche sur deux pattes, qui n'a pas de griffe et qui oblige des chats à vivre à-avec eux. Ils les "domestiquent". Pf, ils les rendent mous, gros et paresseux ouais.

Ça doit bien faire quelques heures qu'il se balade à travers les bois. Hum... "balader" n'est pas le bon mot. Vagabonder conviendrait mieux. Parfois, il se surprend à accélérer le rythme, à courir en contournant les arbres, il se trouve même un jeu. Il trouve? Non, il retrouve. Ce petit jeu, de foncer en ligne droite, virer sur le côté quand un tronc d'arbre se présente en face, sauter au dessus d'un petit trou, slalomer entre les bosquets. Il n'y a que deux règles à ce jeu ; la première est qu'il ne faut jamais s'arrêter, jamais hésiter sur le chemin à emprunter. Sinon, c'est perdu. La deuxième, toujours foncer, tête baissée. Aller le plus rapidement possible, sans faire attention au reste. Il sourit quand il se met à courir, puis à sprinter. Il évite trois bouleaux, rencontre une petite clairière pleine de petits buissons qu'il franchit sans réfléchir. Il ferme les yeux et sent un petit point de côté, c'est assez désagréable. De se sentir à bout de souffle. Il continue sa course folle. Les paupières closes, sinon, ça ne serait pas drôle.

Il file comme une flèche, une de ses pattes s'appuie sur un caillou pointu et reste coincé. Il grogne, mais décide de ne pas s'arrêter. Il donne un coup de patte contre une racine et le caillou valse au sol. Loup court toujours à perdre haleine. Il finit par heurter quelque chose. Un éclair blanc. Ça a une odeur assez forte, que Loup reconnait en se mordant la lèvre. Il percute l'animal, roule au sol sur quelques queues de renards en entraînant l'autre dans sa chute et se relève bien vite, il s'ébroue pour se débarrasser de la poussière qu'il déteste, Loup est visiblement mécontent. Agressif? Ou hargneux? Aucune idée, mais son ton n'est guère agréable. Il est assez accusateur mais Loup a honte d'avoir rencontré le matou au pelage blanc alors qu'il s'amusait tout seul à son jeu d'apprenti.

« Ow! Ça te dérange pas de rester planter là, en plein milieu du chemin? Elixir de Vie c'est ça? Tu pouvais pas te pousser, c'était trop difficile, hum? Eh! Non mais franchement... Encore le clan du Sable, j'me trompe?! »